CHAMPSAUR DIGNE

 

21/06/06.

CHAMPSAUR

I - La Salle en Beaumont

Rive droite du Drac, c’est la région du Beaumont, rive gauche c’est le Trièves.

Les terrains du Beaumont sont du jurassique inférieur, ils ont été très creusés par les glaciers au Riss et au Würm. Il y a donc de nombreux placages morainiques le long de ces collines liasiques.

 

Il y a eu un éboulement important au-dessus du village il y a 10 ou 15 ans, plusieurs maisons et une partie de l’église ont été détruites. Le mauvais écoulement de l’eau suite à un manque d’entretien du canal du Beaumont aurait entraîné lors de pluies importantes la liquéfaction de ces terrains morainiques.

Ce genre de problème est très souvent rencontré par la DDE pour les routes de la région: les vibrations dues à la circulation en présence d’eau entraînent la liquéfaction de l’assise de certaines portions de route qui s’effondrent. Le traitement de ce problème passe actuellement par un bon drainage et l’utilisation de polystyrène ou de vieux pneus remplis de graviers pour limiter les vibrations.

Dans le massif de l’Obiou et dans le Dévoluy, la mer était trop profonde pour que le calcaire garde son faciès urgonien. Le calcaire est du sénonien (crétacé sup), nombreux calcaires à silex.

 

II - Chauffayer.

Le nom de Dévoluy signifie probablement " éboulis ". La vue sur ce massif depuis le Chauffayer constitue une belle coupe de son rebord oriental, qui donne de ce dernier une coupe naturelle N-S fort intéressante, puisqu'elle coupe les plis E-W qui sont masqués sous le Sénonien à l'intérieur du massif. Nous sommes en face du pic de Pierroux et de la montagne de Faraut. La couche sommitale est du calcaire du sénonien et en-dessous, au niveau du Chapeau de l’Evêque, une barre de calcaire du tithonique. Entre ces couches, zone de terrains plus argileux avec une petite barre calcaire du barrémien formant un béquet.

La discordance angulaire à la base du sénonien prouve qu’il y a eu plissement des couches de calcaire du barrémien, entre l’aptien et le début du sénonien (entre la fin du crétacé inf et le début du crétacé sup). Ce plissement ante sénonien est plus ancien que les plissements les plus anciens des Alpes et notamment que les plissements pyrénéo provençaux. Par ailleurs, les grands plissements du Dévoluy sont perpendiculaires à l’orientation de ces plis. Ces plissements pourraient correspondre au début de la subduction dans l’océan alpin.

A l’E, vue sur l’Olan et de la cime du Vallon largement pris par les nuages.

III – Ecole d’escalade de Pont du fossé.

Le Champsaur est la vallée la plus méridionale du massif des Ecrins.

Au pied de la falaise d’escalade à l’E de Pont du Fossé, de gros blocs de grés sont tombés de la partie sommitale de la falaise: gré du Champsaur. Il correspond au gré (flyschs) des aiguilles d’Arves plus au N ou à celui d’Annot plus au S. Présence d’inclusions dans ce gré dont des inclusions d’argile noirâtres: la trilogie gré/ argile/ calcaire correspond au nummulitique: période la plus ancienne du tertiaire paléogène regroupant le paléocène, éocène et l’oligocène. Les nummulites sont visibles à la loupe dans la falaise d’escalade.

Lors de la formation des Alpes, suite à la rupture entre les parties haute et basse de la marge continentale (front pennique) il y a eu retour de la mer : la mer nummulitique avec la formation de dépôts calcaires suivis de dépôts détritiques lorsque la mer devient plus profonde (érosion des premiers massifs alpins).

Il y avait déjà eu un premier retour de la mer au début de la collision entre les plaques africaine et eurasienne, il avait donné naissance aux flyschs à helminthoïdes présents à Orcières.

En tout, il y a eu trois retours de la mer lors de l’orogenèse des Alpes: au crétacé supérieur (helminthoïdes), au début du tertiaire (paléogène ou nummulitique) et au miocène (molasses de la région de Grenoble).

 

III – Orcières.

Le Drac se divise au-dessus de Pont du fossé entre le Drac Blanc qui descend du massif du Pelvoux par le Champoléon et le Drac Noir qui descend d’Orcières.

En dessous du village d’Orcières, recherche des traces d’helminthoïdes dans les flyschs en bordure du Drac Noir. Les flyschs à helminthoïdes proviennent des dépôts dans la zone liguro piémontaise. Lors de la subduction du plancher océanique, la plupart des sédiments et flyschs s’enfoncent et donnent les schistes lustrés tels que ceux du Queyras, une partie échappe à la subduction et donne la nappe de charriage à flyschs à helminthoïdes (nappe de l’Embrunais).

Bord de route en dessous d’Orcières.

Bord de route un peu en descendant du village. La matrice de la roche détritique est très noire très schistosée avec la présence de gros blocs. On est en présence de wildflyschs (flyschs à blocs), ces blocs sont des olistolites (olistostrome : accumulation chaotique de blocs - olistolites - au front d’une nappe de charriage emballés dans les dépôts en cours de sédimentation). La nappe de flyschs à helminthoïdes a avancé au fond de la mer sur des couches de sédiments argileux noirs, lors de cette avancée, le front de la nappe se fissure, se désagrége et laisse tomber des débris qui se mélangent à la vase argileuse et aux blocs arrachés au substrat autochtone. L’avancée de la nappe crée la schistosité. Toute la région d’Orcières est tapissée de ces schistes à blocs qui sont à l’origine de l’appellation de Drac Noir.

Le front pennique marque la limite entre les flyschs à helminthoïdes et les grés du Champsaur.

Au fur et à mesure de la subduction, les écailles de flysch remontent et chevauchent en les repoussant les couches briançonnais à dauphinoise.

Coupe de la vallée

Le flysch à helminthoïdes du crétacé sup se déplace donc au-dessus du gré du Champsaur et des flyschs à blocs. Le Drac noir est entaillé dans la zone des Alpes internes alors que le Drac blanc est dans les Alpes externes.

 

IV – Champoléon.

Le débouché du Champoléon dans le Champsaur se fait entre l’aiguille de Cedera et le Vieux Chaillol. Le socle cristallin est au-dessus du trias (dolomie et un peu de basalte), le jurassique est au-dessous. Les basaltes résultent de la distension de Pangée à la fin du trias (voir schéma ci dessus).

 

Il y a série inversée et discordance angulaire entre le calcaire nummulitique et le jurassique. Le schéma ci contre montre qu’il y a eu plissement du jurassique (et peut être du socle à moins qu’il s’agisse d’une écaille) sous l’effet d’une tectonique compressive ante nummulitique (serrage N – S) et non du sénonien. C’est le sud des plissements pyrénéo provençaux.

 

 

Le plissement alpin est orienté SE – NW. Belledonne et le massif des Ecrins constituent un énorme patatoïde plus ou moins contourné par les nappes de charriage des Alpes internes: avant le chevauchement alpin il y a eu une première phase de plissement. Il n’y a pas de plissement pyrénéo provençal au Nord de Belledonne.

Les pénitents des Mées sont en extrémité du plateau de Valensole, ce sont des conglomérats de la fin du miocène (pontien). Ils ont été sculptés par l’érosion suite à la fissuration de l’extrémité du plateau au dessus de la vallée de la Durance.

 

22/06/06

REGION de DIGNE.

I – Digne.

Il s’agit en deux jours de faire la coupe géologique le long du Bès de Verdaches à Digne.

Les roches des collines autour de Digne sont les mêmes que celles des Pénitents des Mées : la molasse de Valensole: ocre avec des galets. Cette molasse du miocène pliocène, plus ou moins fluviatile représente les terrains autochtones du Dignois.

Ces terrains autochtones ont été localement recouverts par la nappe de Digne. Un des lobes de cette nappe s’étale jusqu’au village d’Esclangon où une demi-fenêtre laisse entrevoir les terrains autochtones : la demi-fenêtre de Barles.

Le front de la nappe est du jurassique, elle repose sur du miocène, il y a donc inversion. Les terrains bariolés plus ou moins rouges sont des argiles du Keuper (sous étage du trias sup) avec du gypse. La nappe a glissé sur du gypse qui forme un peu au Nord de Digne dans la vallée de la Bléone un diapir versicolore. Dans la même zone, la maison du parc géologique est bâtie en hauteur sur des tufs (le carbonate de calcium a été dissous par les eaux séléniteuses provenant de la dissolution de ce gypse) en saillie sur le flanc de la vallée.

La dalle aux ammonites est dans du calcaire du jurassique inférieur (sinémurien) de la nappe de Digne. Ce sont des ammonites ariétites, il y a aussi quelques nautiles. (Pour mémoire, balade à faire au col d’Arsine, il y a une dalle avec des ammonites 50m derrière le refuge de l’Alpe). Le grand nombre d’ammonites sur cette dalle s’explique soit par un empoisonnement de l’eau par exemple suite à une éruption volcanique soit par une avalanche sous-marine soit par une faible sédimentation sur une certaine durée.

II – La Robine.

On quitte la vallée de la Bléone pour la vallée du Bès, on passe alors sur le lobe de la Robine. Autour du village de la Robine, nombreuses zones de marne très noire stérile très ravinées: bad lands du lias sup (toarcien) appelées robines: ce ne sont pas des terres noires au sens des géologues comme on en trouve au S de Grenoble. Plus on avance vers le N plus on remonte le temps, du toarcien vers le trias.

Au-dessus de ce village, fossile d’ichthyosaure de 185 Ma. Il s’agissait d’un serpent marin qui ressemblait à un poisson : exemple de convergence des formes entre animaux d’espèces différentes soumises aux mêmes conditions d’environnement. Cet animal apparu à la fin du primaire a disparu à la fin du secondaire, il a pu être daté grâce aux rostres de bélemnites qui formaient sa base alimentaire. Il était ovovivipare comme la vipère: les reptiles pondent des œufs à la coquille dure qui peut rester à l’air libre à la différence des amphibiens qui pondent des œufs à la coquille gélatineuse nécessitant le milieu aquatique pour survivre. L’animal vivant le plus proche de ces ichthyosaures est le dauphin.

III – Esclangon.

C’est l’érosion (probablement glaciaire) qui a séparé les deux lobes (lobe de la Robine et lobe médian) de la nappe de Digne et ouvert la demi-fenêtre de Barles jusqu’au gypse et au-dessous. Ce gypse appartient à la base de la nappe de Digne. En amont d’Esclangon, la vallée est plus ouverte et la rive droite du Bès est très bariolée de couleur rouge plus au moins violacé: ce sont les gypses et cargneules du Keuper.

 

 

 

Dans cette zone, il y a 3 types de molasse: la molasse de Valensole et les molasses marine et lacustre. La molasse marine est vert gris avec des conglomérats, elle est au-dessous de la molasse de valensole. Sur les dalles de gré de molasse marine en bord de route, des ripple marks sont visibles. Les couches calcaires du lias inf (sinémurien) ont un pendage de plus en plus important, elles recouvrent les bancs clairs de l’hettangien.

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Dans le paysage en face du village d’Esclangon, présence de molasse lacustre rouge incluant de gros blocs et de calcaire gris du lias. En amont, la molasse marine marneuse et gréseuse dans laquelle on trouve des traces de pattes d’oiseaux. La molasse marine repose en concordance sur la molasse lacustre

Paysage en face du village d’Esclangon: il y a eu plissement et érosion avant nouveau dépôt à l’oligocène et un nouveau plissement (pli couché par le passage de la nappe de Digne). Les éléments détachés (tithonique) par l’érosion sont inclus dans la molasse qui se forme en point bas : gros blocs de tithonique incorporés dans la molasse.

Montée au Vieil Esclangon et au Serre d’Esclangon par un sentier raide cheminant dans les grés et marnes de la molasse rouge. Lors de cette montée, on traverse plusieurs fois de petites couches calcaires verticales dont on peut reconnaître le haut et le bas initial par granulo classement : les grains les plus fins sont au-dessus des grains plus gros.

A l’E, la nappe de Digne est bien identifiée, elle recouvre des couches violacées du Keuper, puis au-dessous des molasses versicolores incluant en partie basse de gros blocs clairs de tithonique.

Au N, deux barres tithoniques correspondent à des plis d’orientations différentes, il y a donc eu deux phases tectoniques

A l’W, le vélodrome, structure sculptée dans la molasse marine, a la forme d’un tore. Il s’est formé progressivement pendant le dépôt du miocène. La courbure annulaire des couches du miocène est due à l’intersection d’un synclinal avec un pli presque orthogonal formé avant lui.

Le second de ces plis est enroulé par un troisième encore plus tardif ce qui donne la courbure orientale

 

Tectonogramme schématique simplifié de la formation du vélodrome (M. Gidon)

L’examen de ce paysage montre qu’il y a eu 4 phases dans la structuration du paysage :

1 – avant le dépôt de l’oligocène, formation des plis E – W érodés jusqu’aux Terres noires

2 – après le dépôt de l’oligocène et pendant celui du miocène, poursuite du plissement précédent et déformation de la bordure du bassin néogène

3 – à la fin du pliocène, mise en place de la nappe de Digne avec chute d’olistostromes dans la molasse sous jacente.

4 – au quaternaire, déformation d’ensemble par des plis à grande longueur d’onde, érosion fluviatile et glaciaire (lambeaux de terrasses wurmiennes).

 

IV – Clue de Pérouré

C’est la dernière des 3 clues de Barles.

Dés l’entrée de la clue, il y a une inversion stratigraphique entre le Berriasien et le tithonique le tout au-dessus de bancs relevés à 90° de molasse rouge (oligocène) incluant de gros blocs de calcaire tithonique. Ceci démontre que les couches de calcaire tithonique et berriasien étaient déjà relevés à la verticale lors de leur dépôt et que cet ensemble a ensuite été renversé

En bord de route, avant d’arriver au tunnel par l’aval, contact visiblement discordant entre les couches de calcaire berriasien et la molasse oligocène (photo ci dessus). Au niveau du tunnel, les couches de calcaire tithonique sont inclinées à 45° avec de nombreuses stries de glissement différentiel entre chaque couche correspondant à une déformation E – W post oligocène. Sur la rive en face en amont du tunnel, les irrégularités de stratification sont bien visibles, elles correspondent notamment à l’action des courants.

Plus en amont de la clue, les couches du Kimméridgien aux Terres noires sont aussi en inversion stratigraphique.

23/06/06

I - Verdaches.

En quittant vers le NE la nappe de Digne, on retrouve la semelle de gypse les cargneules de la nappe de Digne. La molasse de Valensole est le niveau le plus élevé de l’autochtone du Dôme de Verdaches.

Dans la clue de Verdaches, arrêt à l’embranchement avec la route partant vers Auzet. Les affleurements de bord de route sont en quartzite du trias : larges stratifications avec un léger pendage vers l’W du trias appartiennant à l’autochtone.

Un peu plus avant en direction d’Auzet, l’épaisse couche de quartzite repose en divergence angulaire sur des roches noires: des fossiles d’herbes et de fougères permet de dater cette couche du carbonifère. Elle appartient au socle de Verdaches, elle a été plissée puis érodées avant le dépôt des quartzites. La roche du carbonifère est un gré micacé appelé spallite: ce gré résulte de l’érosion qui a conduit à la formation de la pénéplaine hercynienne. Il y a contact direct entre le carbonifère et le trias car dans nos régions le permien correspond à une période désertique peu favorable aux dépôts.

 

II - Clue de Barles :

On sort du trias en arrivant à Barles pour entrer dans le jurassique. En allant jusqu’à Barles, après la quartzite on trouve la dolomie et le gypse qui sont la suite de l’échelle stratigraphique. Les premiers bancs calcaires du lias inf sont à l’entrée du village et se prolongent jusqu’au sommet au-dessus (Le Château), les derniers se trouvent après le tunnel, ces bancs verticaux s’inclinent légèrement sur les couches de lias sup.

A l’entrée des clues coté Barles: passage des marnes bajocienne au Kimméridgien.

La nappe de Digne est passée par-dessus toute cette zone ce qui a entraîné des plissements et des basculements de plis puis la nappe a été complètement érodée. Les séries calcaires ont été rebroussées.

Avant le passage de la nappe de Digne, le calcaire liasique était la couverture de cette zone, elle a été repoussée par la nappe: il y a eu substitution de couverture. La couverture liasique a été repoussée et inversée, le décollement s’est produit au niveau du gypse. Ce lias est autochtone, il est différent de celui de la nappe de Digne. On trouve ensuite les terres noires argileuses : callovo oxfordien. Ce sont des séries beaucoup moins épaisses que dans la nappe de Digne (mais contenant des fossiles différents des terres noires vues hier à la Robine qui étaient du toarcien).

Le passage du Kimméridgien au Tithonique se fait au milieu de la clue, dans les bancs verticaux sans critère permettant de les distinguer. Les zones bréchiques correspondent à des éboulements donnent des strates très épaisses, les zones calmes donnent des strates moins épaisses. Les couches du jurassique supérieur atteignent dans la clue une épaisseur totale tout à fait inhabituelle, ceci est dû aux apports gravitaires d’éléments bréchiques.

 

En aval des clues de Barles

Le débouché aval de la clue correspond à la limite stratigraphique entre le Berriasien et le tithonique. Celui ci présente des bancs épais de calcaire parfois bréchique.

 

 

Les niveaux argileux entre les clues de Barles et de Pérouré ont été fortement schistosés, l’orientation de l’angle S1 ® S0 montre que l’on est sur le flanc d’un pli qui a été retourné (la granulométrie des dépôts montre quel a été le haut et le bas lors du dépôt).

Ces bancs calcaires présentent un granulo classement permettant de connaître le bas et le haut de la couche. En partie basse de certains bancs calcaires (soit la partie au-dessus du banc vertical qui est légèrement incliné), de gros bourrelets de roche correspondent à des courants sous-marins qui ont creusé des sillons. L’examen du détail des irrégularités de surface permet de déterminer le sens d’écoulement du courant: figures de courant.

 

Au-delà, on retrouve les couches de calcaire du Berriasien.

Coupe de la vallée du Bès de Digne à Verdaches

 

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