METHODES de DATATION
GEOCHRONOLGIE
Il existe deux approches de datation, la datation relative
et la datation absolue. L’approche radiochronologique est absolue mais cette
méthode est récente. L’approche relative utilisant notamment les fossiles est
plus ancienne.
HISTORIQUE :
Le premier à s’être posé le problème de mettre des dates en géologie est Buffon
en 1744, et comme il n’avait pas peur il s’est attaqué à l’age de
Avant lui, les Egyptiens parlent déjà de cycles de grandes
catastrophes tous les120 et 360 ka. Hipparque (grec –120, -120) découvrit la
précession des équinoxes et calcula que la rotation de l’axe était complète en
36 ka. Aristote avance l’hypothèse que la présence de coquillages dans
certaines strates montre qu’un jour, la mer recouvrait les zones concernées
émergées à son époque.
Celsius en 1727 et Gessner en 1758 ont évoqué à différentes
occasions qu’un age de 6000ans pour la Terre était trop court pour expliquer le
niveau de certaines plages en Finlande ou le temps pour que les Apennins se
soulèvent jusqu’à leur altitude actuelle. L’abbé Soulavie (un ardéchois) estime
que 6000ans n’étaient pas suffisants pour expliquer le creusement de certaines
rivières de son pays. Ils évoquent des ages de l’ordre d’1 Ma.
Le Danois Sténon (1638 1686) montre que les glossopètres aux
vertus miraculeuses sont des dents de requins fossilisées et que les fossiles
sont les restes d’animaux vivants qui se sont transformés par pétrification au
sein des sédiments. Il jette les principes de la notion de strates en tant
qu’unité de temps géologique.
Lamarck (1744-1829) fut le premier à défendre la théorie de
l’évolution sans être capable d’en décrire le moteur. Cuvier (1769-1832) est à l’origine de l’anatomie et
de la paléontologie comparées, il démontre l’existence des extinctions
d’espèces ce qui autorise l’utilisation des fossiles pour les datations. Avec
Brongniart ils sont les premiers à reconnaître la succession de strates par les
fossiles qu’ils contiennent et à comparer des strates géographiquement
éloignées par les fossiles qu’elles contiennent.
D’Orbigny (1802 1857) assure la description et le classement
de nombreux fossiles, crée la micro paléontologie et fait la description de 20
stratotypes.
Kelvin 1824-1907 calcule thermodynamiquement un age de 50 ka
en l’absence de toute source interne.
Au XIXéme siècle, établissement de la première
échelle stratigraphique.
En 1896, Becquerel découvre la radioactivité puis Rutherford
met au point la méthode de calcul par mesure de l’4He produit par la
désintégration de U et Ra et donne un premier age de la Terre à 400 Ma. De
nombreuses mesures ont suivi et en 1929 un consensus entre les scientifiques se
fait autour d’un age de la Terre de plusieurs Ga pour un age maximum des temps
fossilifères de 500 Ma. En 1955, Patterson annonce 4,5 Ga pour l’age de la
Terre.
Bizarrerie, la géologie a précédé l’astronomie dans la prise
en compte du temps dans ses observations ( W Herschel en 1814) alors que la
vitesse de la lumière est connue depuis 1676.
Ces méthodes permettent de définir
l’enchaînement des évènements sans pouvoir les caler précisément dans le temps.
Principes de base :
A – Principe de superposition :
A
l’origine, les couches les plus récentes recouvrent les couches les plus
anciennes.
- Principe
d’évolution :
Le
principe spécifiant que toutes les espèces possibles ne sont pas contemporaines
est admis. Ceci signifie notamment qu’il y a eu évolution car il n’y a pas
d’autre explication plausible. Cette évolution ne va pas nécessairement du plus
simple au plus complexe et la paléontologie montre quelques exemples
d’organismes complexes ayant disparus avant l’apparition d’autres organismes
beaucoup plus simples. Une espèce animale ne vit qu’une seule fois, elle est
donc caractéristique d’une époque.
-
Principe
d’actualisme :
Les lois
scientifiques (biologie, physique, chimie) que nous découvrons aujourd’hui
étaient valables autrefois. Ceci permet de faire la comparaison entre les
fossiles que l’on trouve et les organismes actuels. Par exemple, les
céphalopodes connus aujourd’hui sont des animaux marins, les fossiles de
céphalopodes que l’on retrouve sont donc ceux d’animaux marins.
-
Principe
de continuité: (constitue avec le principe précédent le principe d’universalisme)
Les lois physiques sont les mêmes partout, sur Terre comme dans l’espace. Ceci signifie que deux couches géologiques éloignées de la Terre qui contiennent les mêmes fossiles ont le même age. Ceci est vrai en géologie parce que les ages s’expriment en Ma et que l’on peut négliger les temps de transmission qui s’expriment en ka ou 10ka: Cro Magnon est apparu en Afrique il y a 100ka et a colonisé l’Europe occidentale en 40ka.
B – Principe de recoupement :
Un événement géologique est plus jeune que les couches géologiques qu’ils recoupent.
C – Principe d’inclusion :
Le contenu est plus vieux que le contenant. Dans les conglomérats, les galets sont plus vieux que le liant, l’age du conglomérat est celui de son ciment.
Une remontée magmatique est un recoupement et non une inclusion.
Quelques exemples :
La faille f est plus jeune que la couche a qu’elle recoupe.
Discordance angulaire.
Le plissement de a est plus vieux que b et plus jeune que les couches a. La discordance angulaire représente une lacune et plus cette lacune est importante plus la datation relative est imprécise.
Un filon magmatique est plus jeune que la roche qu’il recoupe.
Les olistolites de la faille d’Ornon (Chalp de Chantelouve) sont un bon exemple d’application du principe d’inclusion. On n’est pas en présence d’un éboulement post glaciaire car les blocs triasiques sont inclus dans le jurassique (datation du toarcien par des ammonites). La faille a donc joué au jurassique lors du rifting alpin.
Paléontologie.
Les organismes s’adaptent aux évolutions de l’environnement sinon ils disparaissent.
Espèces : types d’animaux ou de végétaux présentant des caractéristiques communes et pouvant se reproduire entre eux. Cette définition convient aux biologistes mais elle n’est pas applicable avec les restes durs d’animaux disparus d’où une adaptation de cette définition pour la paléontologie.
Toutes les ammonites appartiennent à la même famille mais la famille ammonite n’est pas un bon marqueur car les ammonites ont vécu durant tout le secondaire, de même que les trilobites au primaire.
Pour avoir une meilleure précision il faut descendre au niveau des espèces et des genres. Deux ammonites appartiennent à la même espèce si elles présentent les mêmes caractéristiques morphologiques : modes d’enroulement, cavités, forme, ligne de suture, ornements... Les ammonites sont très diversifiées (10000) et une espèce n’a existé que pendant un temps limité (5Ma max), elles sont donc très intéressantes en datation relative pour le mésozoïque. La précision est telle qu’elle est parfois plus fine que celle des ages géologiques: on parle alors d’horizon (une strate d’Hauterivien dans l’horizon de telle ammonite).
Les fossiles permettent la datation mais il faut aussi noter que certains fossiles sont de très bons marqueurs pour les conditions de l’environnement, certains d’entre eux intéressent tout particulièrement les pétroliers.
Il existe deux types de spécialistes qui sont sollicités pour les datations par les fossiles :
- Les spécialistes dans la détermination des fossiles (espèce en voie de disparition). Les éléments de fossiles trouvés leur sont envoyés et ils sont les mieux placés pour identifier très précisément la bête qui va avec.
- Les spécialistes des tranches de temps : ils savent très précisément tous les fossiles que l’on peut trouver ou que l’on ne doit pas trouver dans une tranche de temps donnée.
D’une manière générale, les coquillages sont peu intéressants pour les datations car ils existaient au primaire et certains existent encore aujourd’hui.
Pour mémoire, les faciès ne sont pas représentatifs d’une période : les calcaires du Fontanil sont du Berriasien dans le Jura et du Valanginien aux environs de Grenoble, ceci est dû à une diminution de la profondeur de la mer qui s’est propagée depuis le Jura vers le Dauphiné.
DATATIONS
fines pour le QUATERNAIRE.
Différentes méthodes existent :
- thermoluminescence (datation absolue)
- paléomagnétisme,
- Palynologie (étude des pollens). C’est une méthode très précise en temps et en conditions d’environnement.
-
- Technique de taille des pierres (bifaces). Cette méthode est locale car une même technique n’a pas été utilisée partout à la même époque.
-
L’art rupestre. Cette méthode est aussi locale. On distingue
dans les peintures rupestres du Sahara les périodes successives : naturaliste,
bovidienne, caveline, cameline. Récemment la radio datation des peintures
de
-
La présence ou non de vernis sur les pierres et les
peintures dans le désert peut être utilisé pour
- Dendrochronologie. Le comptage des cernes des arbres ou des alternances de couches claires et de couches sombres dans les terrains argileux au fond des lacs ou les terrains post glaciaires (varves) permettent de calculer le temps passé. Les cernes ou alternances sombres et claires n’ont pas la même épaisseur selon les saisons plus ou moins sèches: les épaisseurs peuvent donc donner une succession de couches épaisses et minces comme dans un code barre permettant des identifications de périodes ( la valeur de 11500 ans a ainsi été atteinte à partir de séquoias géants de 2000 ans et en raccordant les datations d’arbres morts grâce à ces codes barres).
Les varves glaciaires ou lacustres sont parfois difficiles à décoder : les couches sombres correspondent aux périodes ayant plus de végétation (printemps – été) mais faut-il en compter 2 ou 4 par an? Pour le lac de Paladru, il y en a 4, pour les lacs de montagne, il y en a 2.
Thermoluminescence.
La thermoluminescence est la faculté qu’ont certains matériaux à émettre de la lumière quand on les chauffe. Ce phénomène a été découvert par Sir Robert Bayle en 1663 en chauffant un diamant !! Ce phénomène a été étudié par P et M Curie (piégeage d’électrons dans des défauts cristallins sous l’effet d’un rayonnement radioactif).
Ces matériaux ( quartz, calcite,
fluorine, feldspath …) qui se retrouvent dans les argiles et terres cuites
accumulent de l’énergie provenant de la radioactivité à laquelle il est soumis.
Un chauffage à
La méthode peut se résumer ainsi :
-
Chauffage à
-
Exposition d’un échantillon identique ou du même échantillon
préalablement remis à 0 (chauffage à
- Mesure de la radioactivité dans l’environnement du lieu de découverte du vestige.
Cette méthode est d’une précision limitée car de nombreux paramètres entrent en compte : rayonnement cosmique, humidité du stockage, exposition à la lumière, phénomène de saturation…
Exemple:
- datation de la terre qui a été cuite à prés de
- Dans le cadre d’une exposition en 2003, le musée du Louvre avait des doutes vis à vis de l’authenticité de certaines statuettes grecques en terre cuite (tanagra) qui avaient été achetées à la fin du XIXième siècle. Bien que les conditions locales de radioactivité aient été mal connues ce qui limitait la précision de la méthode ; deux groupes de statuettes sont apparus : celles ayant 2500 ans d’age et celles ayant moins de 200 ans.
PALEO
MAGNETISME.
La magnétite (ferrimagnétique) perd son aimantation quand
elle est chauffée au-delà de son point de Curie (
Si on prend une roche ferro ou ferrimagnétique d’age connu par des fossiles ou par radio-datation (contenant par exemple des traces de magnétite, oxydes de fer ou de titane), la direction de son magnétisme donne la direction des pôles à l’époque où elle s’est refroidie au-dessous du point de Curie, à condition que la tectonique n’aie pas changé son orientation et qu’il n’y ait pas eu de réchauffement intermédiaire au-dessus du point de Curie. Si on recherche la position des pôles pour des terrains contemporains de continents différents, on trouve des positions très éloignées. Si on les fait coïncider en déplaçant les continents on retrouve un des arguments majeurs en faveur de la tectonique des plaques de Wegener en reconstituant Pangée.
On a pu reconstituer l’histoire des variations d’intensité et de direction du champ magnétique terrestre par des mesures sur les prélèvements dans les planchers océaniques. Ceci a permis de remonter jusqu’à 160Ma, age des plus vieux planchers. Pour des périodes plus anciennes, il faut avoir recours à des sédiments où des éléments détritiques ferrimagnétiques se sont orientés avant d’être piégés. Une échelle paléomagnétique a été créée et est remise à jour régulièrement. Cette histoire montre des inversions et des changements d’orientation de ce champ. La plus récente de ces inversions a été mise en évidence à Laschamp en Auvergne.
Le pole se déplace régulièrement autour du pole géographique dans un rayon de 1000km soit +/-9°. Une inversion se passe en quelques ka, par exemple une inversion qui a eu lieu il y a environ 19 Ma qui a duré 6ka et dont la trajectoire a été enregistrée dans les coulées de lave (figure ci contre). Lors du renversement, l’intensité du champ magnétique décroît à 10% de sa valeur.
L’origine du champ magnétique est dans le noyau: un effet dynamo (MHD) entre le noyau interne solide de Fe Ni et l’écoulement tridimensionnel fortement convectif de fer et de nickel liquides du noyau externe, les noyaux interne et externe ne tournant pas à la même vitesse. Des simulations expérimentales et numériques du noyau ont permis de créer un champ magnétique mais il n’a pas encore été possible de reproduire ces changements d’orientation et inversions.
Par ailleurs, il a été montré que les anomalies magnétiques des planchers océaniques étaient symétriques par rapport à la dorsale océanique (anomalie + si dans le sens actuel sinon anomalie -). Dans le désert au centre de la Mauritanie, des traces d’érosion glaciaire sont visibles ; le paléomagnétisme montre que la Mauritanie a été au pole à une certaine époque.
La création de l’échelle paléomagnétique a été possible parce qu’il existait des méthodes de datation autres que le paléomagnétique, mais pour des roches appartenant à une période donnée, le paléomagnétisme permet d’améliorer la précision des datations (surtout utilisé pour le quaternaire).
Il y a quatre zones principales : Bruhnes (positive), Matuyama (négative), Gauss (positive) et Gilbert (négative) sur les 4,5derniers Ma. Dans chaque période on trouve de courtes périodes de renversement (événements).
RADIOCHRONOLOGIE.
Cette méthode basée sur la radioactivité de certains isotopes des éléments chimiques a permis la datation des roches magmatiques et métamorphiques et des fossiles qui de marqueurs relatifs du temps sont devenus des marqueurs absolus.
Rutherford a été le premier à utiliser la radioactivité pour dater des roches.
Données
concernant la désintégration des atomes radioactifs
Un atome d’un élément chimique X (tableau de Mendeleïev) est constitué d’un noyau entouré d’un cortège électronique, ce noyau de nombre de masse A contient Z protons (son numéro atomique Z) et A-Z neutrons, A représente donc le nombre de nucléons (protons + neutrons) dans le noyau.
Notation AzX
Un élément possède plusieurs isotopes lorsque le nombre de neutrons varie (z fixe, plusieurs valeurs de A).
Dire qu’un élément est radioactif, c’est dire qu’il est instable et qu’il va se désintégrer en émettant une ou plusieurs particules, de l’énergie et donner naissance à un nouvel élément appelé fils
Père (radioactif) ® fils + particules + énergie
Cette désintégration n’est pas
instantanée, elle dépend du niveau d’instabilité du père, la désintégration de
chaque isotope se produit selon une loi
exponentielle caractérisée par
N = N0 e-lt avec l = ln 2 / T
N est le nombre d’atomes radioactif à l’instant t, N0 le nombre d’atomes radioactifs à l’instant initial.
Les isotopes d’un même élément chimique ont tous les mêmes propriétés chimiques, pour les mesurer ou les identifier, les géologues utilisent principalement le spectromètre de masse qui identifie les atomes par leur masse.
Datation
par mesure de la radioactivité.
Il y a plusieurs origines possibles aux radioéléments que
l’on trouve dans
La méthode consiste à mesurer la radioactivité actuelle pour avoir une date, la difficulté que rencontre les géologues est alors de savoir ce que représente cette date. Différentes méthodes de datations ont été développées, chaque méthode étant adaptée pour un type de mesure avec une détermination justifiée de la concentration initiale en élément père ou fils.
Principales
méthodes utilisées.
père |
constante |
fils |
utilisation |
|
238U |
1,5 10-10 |
206Pb |
minerais d'U, zircons |
méthodes de référence pour longues
périodes |
235U |
1 10-11 |
207Pb |
||
232Th |
5 10-11 |
208Pb |
||
87Rb |
1 10-11 |
87Sr |
biotite, muscovite, feldspaths,
amphibolites, pyroxènes |
87Sr initial difficile à mettre en
évidence |
40K |
5 10-10 |
40Ar |
il faut
que Ar produit soit resté piégé - métamorphisme |
|
|
1,2 10-4 |
14N |
archéologie |
courbe du
|
La datation au
Les autres méthodes utilisent la mesure de la quantité d’atomes pères et fils, le rapport entre les concentrations permet de ne garder qu’un seul paramètre à fixer pour pouvoir effectuer la datation : la concentration initiale en atomes fils. Dans la plupart des cas, les mesures se font sur des roches dont on peut justifier que l’abondance isotopique initiale de l’élément fils est négligeable (systèmes riches). Autrement, il faut trouver une méthode pour estimer l’abondance initiale de cet isotope radiogénique.
Pour savoir ce que l’on a mesuré, il faut une bonne connaissance initiale du contexte. Par exemple, la datation de calcaires argileux du lias des environs de Bourg d’Oisans a confirmé 180Ma. Une mesure faite sur les mêmes calcaires avec du K Ar a donné un age de 15Ma : la mesure était bonne mais la méthode utilisée ne donnait l’age de la création de ces calcaires mais la dernière transformation de recristallinité de ces calcaires lors du serrage dû à l’orogenèse alpine. Lors de ce serrage, il y a eu apparition de schistosité qui a libéré l’40Ar gazeux qui était piégé dans les calcaires argileux.
De la même manière, des roches du massif de Belledonne donnent un age de 400 à 500Ma avec une méthode Pb total (age de la roche qui est hercynienne voire plus ancienne) et de 20 à 40Ma avec une autre méthode (87Rb/87Sr ??) qui correspondent au métamorphisme de l’orogenèse alpine.