CINQ SITES GEOLOGIQUES REMARQUABLES EN AUSTRALIE

 

Désiré Corneloup

 

 

NOTA : L'Association Meta Odos ( www.metaodos.com ), qui organise des voyages de découvertes géologiques, a conduit, du 13 juillet au 9 août 2008 , dix-huit professionnels ou amateurs avertis, sur les sites parmi les plus fameux de la partie sud de l'Australie : les Blues Mountains et le Bassin de Sydney, la région d'Adélaïde, Brachina Gorge et la faune d'Ediacara, Coober Pedy et les mines d'opales, le Centre Rouge et Ayers Rock, Alice Springs et les McDonnell Ranges, et la Côte Ouest avec les stromatolites vivants de Thétis et de Shark Bay et le célèbre site des Pinnacles. Le groupe était animé par Michel Ballèvre, Professeur de Géosciences auprès de l'Université de Rennes, actuellement détaché auprès de l'Université de Sydney. La partie géologique était complétée par un passionnant volet zoologique animé par Maryvonne Charrier, Maître de Conférences auprès de l'Université de Rennes (UMR CNRS 6553). 7 000 km ont été couverts par voie terrestre durant ces vingt-huit jours d'exploration. Comme la description détaillée de ce voyage serait fastidieuse, je me suis contenté de présenter succinctement les cinq sites qui m'ont paru géologiquement les plus remarquables, après avoir ébauché un aperçu de la géologie de cette île-continent qu'est l'Australie.

 

ASPECT GEOGRAPHIQUE ET GEOLOGIQUE

 

Le Commonwealth d'Australie, capitale Canberra, couvre une surface de 7 741 200 km2, soit 15 fois la France , avec vingt millions d'habitants dont seulement 1% d'Aborigènes qui peuplent l'île depuis 40 000 ans. Les premiers Européens sont arrivés en 1606 et ont commencé à coloniser le pays en 1788. La langue officielle est l'anglais alors que coexistent environ 200 autres langues (aborigènes et immigrantes) sans qu'aucune loi n'en interdise l'usage. Le système politique est une fédération de six états et onze territoires.

L'Australie est un pays plat en grande partie recouvert de zones désertiques ou semi-arides. Seule la côte orientale est bordée de chaînes montagneuses avec le Mont Kosciuszko, 2 229 m , point culminant du pays. L'Australie du sud-est et du sud-ouest bénéficie d'un climat tempéré, la partie nord étant tropicale humide. Le climat est fortement influencé par les courants océaniques qui encerclent littéralement l'île.

L'Australie est riche des productions minières de son sous-sol : premier producteur mondial de bauxite et de diamant, mines de charbon, de fer, de plomb, de cuivre, d'or, d'argent, d'uranium (12 000 tonnes exportées), et pétrole dont la production dépasse 200 000 barils par jour. Les terres arables couvrent environ 6% du territoire et la sécheresse y sévit parfois. L'Australie est pratiquement autosuffisante du point de vue agricole et exporte vers l'Europe de la viande de mouton et de bœuf.

L'Australie est parfois appelée « lucky country » : la dette publique est inexistante, les comptes publics   sont au vert et les impôts diminuent.

L'Australie est un très vieux continent (croûte de 3,5 Ga contenant des zircons de 4,4 Ga) qui fait partie de la plaque indo-australienne. Cette plaque comprend deux continents, l'Inde et l'Australie,   qui se déplacent   vers le nord à la vitesse moyenne de 70 mm/an, séparés par l'Océan Indien. Au Cambrien, l'Australie appartenait au supercontinent de Gondwana qui regroupait l'Amérique du Sud, l'Afrique, l'Inde, Madagascar et l'Antarctique. Au Mésozoïque ce supercontinent a fini par se   scinder, la dernière scission Australie-Antarctique ayant eu lieu il y a 100 Ma.

A l'Archéen l'Australie était formée de trois cratons : Yilgarn, Pilbara et Gawler.

Au Protérozoïque, des bassins sédimentaires se sont formés, entrecoupés de glaciations successives, et les stromatolites, ces matelas cyanobactériens apparus à l'Archéen et qui furent les premiers signes de

vie, se sont abondamment développés. Enfin, il y a 1,6 Ga, les trois cratons et les bassins se sont

 

                      

 

                                 Carte géologique de l'Australie (explication en conférence)

 

assemblés pour former l'ossature de l'Australie actuelle. C'est à cette époque que se sont mises en place les formations minérales, sources actuelles d'or,   de cuivre, de plomb, de zinc, d'argent et d'uranium. C'est vers 600 Ma, au Protérozoïque Supérieur, alors que l'Australie occupait une latitude proche de l'équateur, qu'est apparue une glaciation, probablement la plus importante que la Terre ait connue. Les régions équatoriales étant couvertes de glaces, les géologues en ont conclu que toute la Terre devait être englacée. Cette époque a été appelée «  la Terre boule de neige », ou « snowball earth ». En Australie ce fut la glaciation marinoène dont les traces sont visibles dans le North Territory. C'est aussi à la fin du Protérozoïque que les alluvions issues du démantèlement d'une chaîne de montagne, les Peterman Ranges, ont été à l'origine de la formation d'Ayers Rock (Uluru) et des Olgas (Kata-Tjuta).

Les stromatolites, seule « matière » vivante à l'époque, rejetaient de l'oxygène. Cet oxygène se recombinant avec d'autres éléments a été à l'origine de nouveaux organismes et de nouvelles formes de vie plus complexes qui ont fini par supplanter les stromatolites. Il s'agit de la faune d'Ediacara dont on peut observer les premiers fossiles dans les Flinders Ranges datés de 550 Ma.

Il y a de 535 à 400 Ma (Cambrien, Ordovicien, Silurien), une importante explosion de vie marine a eu lieu dans des mers peu profondes qui recouvraient la partie ouest de l'Australie, tandis que des sédiments se déposaient à l'est dans des eaux profondes et que plusieurs arcs volcaniques andésitiques puis rhyolitiques formaient les premiers reliefs de la côte orientale. La mise en place de plutons granitiques, l'érosion et les mouvements de compression est-ouest ont remanié la morphologie de l'Australie durant tout le Paléozoïque.

Durant le Carbonifère et le Permien, l'Australie a connu une succession de périodes de glaciations, de dégel et d'érosion avec la formation de bassins de tourbes   qui ont été à l'origine des charbons. Le magma a continué à s'épancher à l'est du continent sous forme de volcans ou de flots de lave. Les traces des périodes de glaciation sont encore visibles en maints endroits : rochers striés, poli glaciaire, poudres de glaciers, blocs erratiques, dropstones…

A la limite Permo-Trias a eu lieu une grande extinction des espèces. Cette extinction a été attribuée aux trapps de Sibérie qui se sont répandus sur 1,5 million de km2 durant plus d'un million d'années et qui ont complètement modifié le climat de la planète.

Durant le Trias et le Jurassique, l'Australie est devenue de plus en plus chaude : sont alors apparus les ammonites, les dinosaures, les reptiles et les premiers mammifères. Il y a 154 Ma, l'Inde s'est séparée de l'Australie et les mers se sont mises à envahir pratiquement toutes les plaines du continent jusqu'à atteindre un maximum au Crétacé, il y a 117 Ma. Le volcanisme de la côte orientale est resté toujours actif, devenant parfois ignimbritique. La tectonique de compression et d'extension a joué le long de cette côte.

Il y a 50 Ma, à l'Eocène, l'Antarctique et l'Australie étaient complètement séparés. De nouveaux courants marins se sont alors établis au sud de l'Australie provoquant des changements climatiques : les périodes humides, de refroidissements et d'aridité se sont succédé. Les déserts de sables et les grands lacs salés sont apparus à l'intérieur du pays, et ceci d'autant plus que l'Australie remontait vers le nord, donc vers les régions équatoriales. Les derniers millions d'années ont vu alterner des périodes de glaciations avec bas niveau marin et des périodes relativement chaudes avec haut niveau marin.   

D'une façon générale, les grandes déformations tectoniques des régions voisines n'ont eu que peu d'effet sur l'Australie qui reste un continent relativement stable. En témoigne la Grande Barrière de Corail située au nord-est et qui s'étend sur quelque 2 000 km . Pour qu'une telle Barrière puisse se former, il faut un continent stable, une mer peu profonde et chaude, peu de prédateurs (l'homme y est actuellement le plus virulent !) et un afflux approprié de sédiments provenant de rivières côtières calmes.  

 

 

LE BASSIN DE SYDNEY ET LES BLUE MOUNTAINS

 

Capitale de l'Etat du New South Wales, Sydney est situé au bord d'une profonde baie qui s'ouvre sur la Mer de Tasman. Dans les environs de Sydney et au sud s'étend une zone à faible relief et faible altitude, le Bassin de Sydney. Vers l'ouest, cette zone cède brusquement la place au relief des Blue Mountains, d'altitude moyenne 1 000 m , où le réseau hydrographique est profondément encaissé.

Le Bassin de Sydney est constitué de formations sédimentaires permo-triasiques subhorizontales, épaisses d'environ deux kilomètres, marines d'abord, puis deltaïques avec intercalation de charbon dans le Permien,   et enfin fluviatiles. Ces formations reposent en discordance sur des séquences ordoviciennes à dévoniennes fortement plissées. Les grès et les argiles qui apparaissent dans le Trias affleurent largement dans la ville de Sydney où les épaisseurs peuvent atteindre plusieurs dizaines de mètres.

Les affleurements du Bassin de Sydney peuvent être observés dans les nombreuses falaises et dans les baies qui s'échelonnent sur une centaine de kilomètres au sud de Sydney.

Les Trois Sœurs

 

 

Kiama

 

Durras, à l'extrémité sud du Bassin est une longue falaise abrupte qui surplombe la mer d'une vingtaine de mètres. De bas en haut, affleurent en fines alternances   des lits sableux (siltstone) et ferrugineux, formant de spectaculaires anneaux de Liesgang, et des niveaux détritiques où se succèdent les bancs gréseux et conglomératiques. Les conglomérats sont parsemés de blocs d'origines diverses, parmi lesquels on peut voir de nombreux dropstones, blocs abandonnés lors de la fonte des glaciers, lorsque l'Australie et l'Antarctique faisaient un même continent. Affleurent aussi des empreintes variées de bivalves, de bioturbation et du bois fossilisé daté du Permien aux cernes bien visibles.

Sur le plateau surplombant la falaise on remarquera les étranges figures géométriques en forme de boîtes formées par les oxydes de fer qui se sont intercalés dans des grès aux multiples failles. Dans l'arrière-pays croissent les forêts de cycas géants et d'araucarias.

Dans les falaises de Gerroa (Black Head) des bancs de grès de couleur verdâtre sont formés principalement de roches volcaniques : ce sont des greywackes.   Certains bancs de grès sont riches en fossiles qui ont conservé leurs tests.

Dans les falaises d'Austinmer, d'origine deltaïque, affleurent les grès et les silts avec rides et traces de bioturbation, et quatre niveaux de charbon, entre lesquels s'intercalent des niveaux de tuffites provenant des éruptions d'un arc volcanique voisin.

Le site des carrières de Kiama, en bord de mer, est la « Chaussée des Géants » de l'Australie. Sur des dizaines hectares, jaillissent des gerbes de colonnes verticales, pour la plupart hexagonales, de 10 à 15 m d'haut et de 1 à 2 m de diamètre. La roche, aux plagioclases maclés très apparents, est une latite (variété de   trachyandésite).

Les trois pitons rocheux des « Three Sisters » situés à Katoomba, à une centaine de kilomètres au nord-ouest de Sydney, restent le site le plus célèbre et le plus spectaculaire des Blue Mountains. Il s'agit de vestiges d'érosion d'escarpements gréseux triasiques de plus de 120 m de haut. Au pied de ces escarpements alternent des argilites (claystones) et des niveaux de charbon. Au Miocène, des coulées de laves basaltiques ont recouvert localement les plateaux gréseux des Blue Mountains. Ces reliefs assez monotones sont entaillés par de profondes gorges creusées par les rivières, il y a environ 15 Ma. De Echo Point Lookout on peut observer l'ensemble des Blue Mountains et, en descendant au pied des falaises, par un sentier parfaitement aménagé et documenté, parmi les forêts d'eucalyptus et de fougères arborescentes, on peut suivre toutes les formations géologiques mentionnées plus haut. On pourra aussi croiser le fameux oiseau-lyre. L'excursion prend six heures et le dénivelé est d'environ 400 m .  

 

  LA FAUNE D 'EDIACARA

 

La faune fossile d'Ediacara est d'une grande importance dans le cadre de l'apparition et de l'évolution des espèces. Cette faune est d'ailleurs appelée « le berceau de la vie » (cradle of life).   Il s'agit de fossiles qui sont la première évidence d'organismes multicellulaires organisés sur Terre : nos ancêtres, en quelque sorte ! La faune d'Ediacara, apparue il y a environ 550 Ma, a succédé au long règne sans partage des stromatolites, matelas cyanobactériens organo-sédimentaires vieux   de plus de 3 Ga. On verra les derniers stromatolites vivants à la fin de ce voyage à Hamelin Pool et au lac Thetis.

Les moulages laissés dans la roche par les fossiles d'Ediacara peuvent être vus au South Australian Museum à Adélaïde ou sur le terrain, dans le Flinders Ranges National Park, à quelque 500 km au nord d'Adélaïde. Les plus célèbres de ces fossiles sont le Dickinsonia costata qui apparaît comme une auréole de vers de terre segmentés qui peut atteindre un mètre de diamètre et le Charnodiscus longa d'une trentaine de centimètres de long, en forme de fougère se terminant en plume.

Quelques traces de fossiles affleurent encore dans deux sites protégés : Wilpena Pound et Ediacara Range, mais en suivant le parcours géologique voisin aménagé pour le public dans Brachina Gorge on peut voir les mêmes formations dans lesquelles ces « ancêtres » ont pu évoluer. Parcourir Brachina Gorge c'est, comme l'indiquent les panneaux géologiques, remonter un « corridor through time ». Partant des alluvions quaternaires on rencontre les calcaires et les grès cambriens avec des traces de trilobites et de mollusques, puis on arrive à la limite officielle Précambrien-Cambrien au Clou d'Or (Golden Spike) à Enorama Creek (Wilkawillina Gorge), entre les grès argileux et les quartzites. La faune d'Ediacara a laissé son empreinte dans les quartzites.

Le voyage d'ouest en est se poursuit sur une bonne piste dans les affleurements précambriens : quartzites, brèche polygénique, grès et schistes, amoncellements de stromatolites fossiles, dolomie, éjectats de l'impact météoritique de Haywood Bluff, toujours dans de spectaculaires gorges très

 

Dickinsonia costata

Charnodicus longa

                      

 

encaissées. La piste se termine au diapir d'Oraparinna, près du quartier général du Parc National des Flinders Ranges. Ce diapir, large de quelques kilomètres est formé de schistes et de roches broyées dans un relief monotone, alors qu'alentour les reliefs sont plissés, pentus et parfois renversés. Cuivre, amiante et barytine sont encore extraits de ce diapir.

On notera enfin que l'explosion de la faune d'Ediacara a eu lieu juste après la fin de l'épisode « snow ball earth ». Il faut des bouleversements drastiques pour qu'apparaissent de nouvelles formes de vie.

 

LES OPALES DE COOBER PEDY

 

La ville de Coober Pedy (Umoona en aborigène et 3 500 habitants), capitale mondiale de l'opale, est située sur la Stuart Highway , à 850 km au nord d'Adélaïde, sur la bordure occidentale d'un immense bassin sédimentaire près des Stuart Ranges. Ce bassin est formé de séquences sédimentaires jurassiques et crétacées. C'est durant le Crétacé Moyen, à l'Aptien-Albien, que les opales se sont formées dans un milieu hydraté froid. L'opale est de la silice d'aspect amorphe formée de très petits cristaux disposés sans ordre précis, et contenant 6% à 10% d'eau. L'opale est translucide et apparaît sous diverses couleurs qui peuvent couvrir tout le spectre de l'arc-en-ciel : cette diversité résulte des solutions géochimiques et des conditions hydrothermales de formation de l'opale et de l'organisation des réseaux de silice diffractant la lumière. L'altération de la silice, qui circule dans les fractures et les cavités de roches argileuses, généralement de la kaolinite ordovicienne, est à l'origine de l'opale.

 

Le site de Coober Pedy

Un filon d'opale

Un Road Train

Coober Pedy apparaît dans une région désertique, pratiquement sans végétation, dans un paysage des plus colorés d'ocres et de kaolinites ; le thermomètre peut y atteindre les 45° C en été (décembre à février). C'est en 1915, qu'un garçon de 14 ans ramassa par hasard une pierre d'opale. A partir de là, après la Première Guerre Mondiale, ce fut la ruée des prospecteurs. La prospection, qui s'étend dans un rayon de quarante kilomètres autour de Coober Pedy, est libre, sous réserve d'obtenir un   « Precious Stones Prospecting Permit » dont le coût est proportionnel à la surface à prospecter. Aujourd'hui, 95% des opales mondiales proviennent de là. L'opale peut être extraite par un mineur travaillant seul : c'est un travail précis et délicat et l'usage des excavatrices et bulldozers « sabote » beaucoup de veines.   Les nombreux mineurs ont truffé   toute la campagne de milliers de trous qui ne sont pas protégés et qui rendent une excursion solitaire hasardeuse. Beaucoup d'anciennes mines ont été transformées en habitations, à l'abri des fortes chaleurs ; ce sont les « dugouts ». On s'en doute, nombreux sont les magasins d'opale et les circuits touristiques sur les lieux d'exploitations. Il est permis de gratter dans les haldes où l'on trouve à coup sûr du gypse fer de lance ou aciculaire et des fossiles de moules, mais très rarement une trace d'opale dans sa gangue.

 

LE CENTRE ROUGE, ULURU ET KATA-TJUTA

 

Partant de Coober Pedy vers le nord, toujours en suivant la Stuart Highway , après 850 km d'une route parfaitement rectiligne, dans une platitude absolue, et où circulent les « road trains », on atteint Alice Springs, le Centre Rouge de l'Australie, le très touristique « Red Center ».

 

Uluru

Géologie de Uluru et de Kata-Tjuta

 

Dans l'Australie Centrale, le socle protérozoïque affleure au nord dans le massif de l'Arunta et au sud dans le massif des Musgrave, massifs séparés par le bassin sédimentaire d'Amadeus qui est riche en   ressources pétrolières. Alice Springs se trouve au pied de l'Arunta et au bord d'Amadeus.

Alice Springs est construite sur un granite leucocrate contenant du quartz, du plagioclase et des orthoses, daté de 1,7 Ga. De nombreux monticules rocheux peuvent être escaladés dans la ville même.

Le site naturel peut-être le plus célèbre d'Australie est Ayers Rock, appelé maintenant Uluru, situé au bord des Musgrave, à 460 km au sud-ouest d'Alice Springs. Uluru est une montagne isolée d'environ 3 km de long et de moins de 2 km de large qui surgit de la platitude du désert qu'elle surplombe de quelque 300 m . Uluru est « considéré » par les agences touristiques comme le plus gros monolithe du monde ! On verra que c'est une interprétation simpliste, ce qui n'enlève rien à la beauté du site. Particulièrement au coucher et au lever du soleil.

Uluru, comme les sommets voisins des Kata-Tjuta (appelé autrefois les Olgas), ont été formés par des dépôts sédimentaires datés de la fin du Précambrien qui provenaient de l'érosion d'une montagne, les Peterman Ranges. Le lieu où se trouve maintenant Kata-Tjuta était plus près de la source de ces sédiments, ce sont donc des blocs de granite, de gneiss et de roches magmatiques qui se sont en priorité déposés et qui apparaissent maintenant sous forme de conglomérats. Sur le site actuel d'Uluru, situé plus loin de la source de sédiments, ce sont des éléments plus fins et des sables contenant beaucoup de feldspath qui se sont déposés en couches successives   et qui sont devenus des grès arkosiques dont on voit aujourd'hui très bien le litage subvertical. Il ne s'agit donc pas d'un monolithe. Il y a 550 Ma, quand l'érosion a cessé, la région a été recouverte par une mer peu profonde. Puis, il y a 400 Ma, la mer s'est retirée et un très fort mouvement de compression a affecté toute la région. Les couches sédimentaires se sont alors plissées et de nombreuses failles sont apparues. L'érosion, essentiellement éolienne, a joué à nouveau, rabotant le paysage et seuls les reliefs les plus indurés sont restés pour apparaître maintenant au-dessus d'une immense plaine alluviale et de dunes nées il y a 60 Ma. Aujourd'hui, l'érosion éolienne se poursuit activement et les dunes formées de sable rouge s'accumulent. Uluru et Kata-Tjuta sont des vestiges montagneux plissés émergeant d'une immense plaine rouge.

Uluru et Kata-Tjuta sont situés dans un Parc National qui est la propriété privée de la tribu des Aborigènes Anangus. Il est donc recommandé de respecter le site, les « lieux sacrés » et   de ne pas photographier les Aborigénes ; l'escalade est interdite, et le géologue doit laisser son marteau dans son sac. Néanmoins des circuits géologiques sont aménagés et parfaitement documentés. A défaut d'échantillons de roches on peut rapporter de beaux clichés.

Enfin, le Centre culturel Aborigène offre toutes les informations utiles : géologie, vie locale, peintures aborigènes, artisanat …

Quoique moins touristique qu'Uluru, les nombreux sommets en formes de têtes de Kata-Tjuta et qui surplombent la plaine de quelque 500 m , entaillés de profonds et pittoresques défilés dans les conglomérats, sont géologiquement beaucoup plus intéressants.

 

Deux, parmi les trente têtes de Kata-Tjuta

Paysage du Centre Rouge

 

SHARK BAY, THETIS ET LES STROMATOLITES CONTEMPORAINS

 

Cette dernière excursion nous conduit au nord de la ville de Perth, le long de la côte occidentale de l'Australie, sur la marge passive, en bordure de l'Océan Indien. Les stromatolites, connus depuis l'Archéen et florissants au Protérozoïque, ne sont plus observables, « vivants » et en formation, que dans de rares endroits au monde dont les plus importants sont Shark Bay, en bord de mer,   et le lac Thetis. Ces lieux sont classés « World Heritage ».

Au fond de la baie pratiquement fermée de Shark Bay   à 850 Km au nord de Perth, dans un site protégé, se trouve Hamelin Pool, isolé par une barre sableuse colonisée par les herbiers,   l'eau y est deux fois plus salée qu'en haute mer car aucune rivière ne s'y déverse et l'évaporation y est intense. C'est dans ce milieu exceptionnel, dans une eau très claire, avec un faible coefficient de marée   et sans aucun prédateur, que se développent les stromatolites jusqu'à quatre mètres de profondeur maximum. Sur plusieurs km2, les stromatolites apparaissent sous forme de mamelons terminés en dômes noirâtres, en général isolés mais proches les uns des autres, d'environ 30 cm de haut et 50 cm à 1 m de diamètre. La vitesse de croissance est inférieure à 0,5 mm/an et la durée de vie d'un mamelon de stromatolites ne dépasse pas mille ans. Les cordons de stromatolites morts du bord de plage se reconnaissent à leur surface recouverte d'oxydes de fer.

Les spécialistes diront qu'il y a au moins trois types de stromatolites présents sur ce site selon la profondeur à laquelle ils se développent.

 

Les stromatolites de Hamelin Pool

Les stromatolites du lac Thetis

 

A Hamelin Pool, un ponton long d'une centaine de mètres permet de s'avancer en mer au-dessus des dômes de stromatolites. Bien que la marée ne dépasse guère 30 à 40 cm , il est intéressant de les observer à marée haute et à marée basse ; l'aspect est très différent selon que la « racine » du mamelon est visible ou non.

L'émotion est grande devant cette forme primitive de la vie sur Terre, alors que l'atmosphère ne contenait que 1% d'oxygène… C'était il y a trois milliards d'années !

A seulement 250 km au nord de Perth, non loin de la ville de Cervantes, se trouve le lac Thetis au milieu d'un   système dunaire. Les stromatolites s'y développent sur le bord, en un récif fringeant, coalescent, dans un milieu 1,5 fois plus salé que l'eau de mer, le fond du lac étant riche en calcium et en bicarbonates. Les stromatolites y apparaissent sous forme de concrétions bourgeonnantes, grisâtres et discoïdales ; ils ont 1 m de diamètre et pas plus de 10 cm de hauteur.   La durée de vie des stromatolites est ici de 1 200 ans, leur croissance est donc inférieure à 0, 1 mm/an. Sur la plage, les cordons de stromatolites morts sont blanchâtres et ont un aspect coralien. C'est encore un autre type de stromatolites qu'à Hamelin Pool qui se développent ici. Comme à Hamelin Pool le site est protégé.

 

 

 

BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE

 

Ballèvre M. & Jolivel J.Y. 2008. Géologie en Australie. 162 p. Livret guide de l'excursion du 13/07 au

                                            9/08/2008, META ODOS. EURL. AJ Conseil. Cesson-Sévigné. France .                          

Johnson D. 2004. The Geology of Australia . 276 p. Cambridge University Press. Edinburgh Building .

                                             Cambridge CB2 2RU. UK .

McDougall B. 2004. Opal in South Australia . 20 p.PIRSA Division of Minerals and Energy. Adélaïde                                            

McNamara Ken 2005. Stromatolites. 28 p. National Library of Australia . Western Australian                     

                                              Museum. Perth. Australie.

Carte Géologique de l'Australie au 1 : 5 000 000.

WEB :

www.gsa.org.au    
www.ga.gov.au
 
www.seaborg.nmu.edu/earth/Permian.html
www.geol.queensu.ca/museum/exhibits/ediac/ediac.html   
www.austmus.gov.au
www.museum.vic.gov.au  
www.amonline.net.au   
www.agso.gov.au/education

Vers : Comptes-rendus des conférences

Vers : Calendrier