VOYAGE dans les BARONNIES.

 

 

23/04/07

 

Départ de Grenoble par l’autoroute puis la RN75 en direction de Sisteron. Les tunnels au sud de Grenoble permettent de franchir les cuestas tithonique puis bajocienne. L’entrée dans le domaine vocontien se fait vers Chichiliane.

 

 

LUS la Croix Haute.

 

            Après le col, au fond de la vallée de la Jarjatte, les deux Aiguilles de Lus se distinguent nettement dans le contre jour du matin.

           

La discordance du sénonien qui repose sur des terrains plissés est caractéristique du Dévoluy (discordance ante sénonienne). Les calcaires à faciès urgonien du Vercors qui correspondaient aux étages aptien et barrémien ont disparu, le barrémien présente toujours des calcaires mais l’aptien est un étage beaucoup plus argileux.

 

            Dans le domaine vocontien, il est typique de trouver des plissements E – W du début du crétacé sup. correspondant probablement aux prémices de l’orogenèse pyrénéo provençale.

 

 

Vallée du BUECH.

 

            En descendant cette vallée du Buech, nous traversons de nombreuses arêtes calcaires : ce sont des clues dans les calcaires tithoniques vestiges de plissements qui ont été érodés.

 

Plissement de BEAUCHENE.

            Un peu avant le village de St Julien en Beauchène, sur la rive gauche du Buech, un très beau pli est visible en prenant un peu de recul sur le flanc W de la vallée (D210). Il s’agit d’un pli anticlinal dans le tithonique, le glissement entre couches n’a pas été suffisant et les couches internes se sont déformées : dysharmonies.

 

 

            Le pli au deuxième plan correspond à celui de Beauchène, il est décalé par une faille. Au premier plan , il remonte immédiatement à la crête suivante, les plis sont très serrés.

Derrière ce pli de Beauchène, on trouve des ammonites pyriteuses.

 

            Les Baronnies sont limitées par le Buech à l’E, les plaines de la vallée du Rhône à l’W, le Ventoux et la montagne de Lure au S, le Diois et le S Vercors au N. Les chaînons des Baronnies, généralement étroits, correspondent soit à l'axe, soit plus souvent aux flancs des anticlinaux. Leurs lignes de crêtes sont ordinairement formées par la barre des calcaires tithoniques qui constitue le trait morphologique le plus marquant du paysage. Dans les anticlinaux les plus ouverts, les " terres noires " oxfordiennes donnent, par inversion du relief, des dépressions occupant le cœur de ces structures. Contrairement à l'impression qui pourrait résulter de la place que tient le Tithonique dans la morphologie locale, on doit reconnaître que celui-ci n'a joué qu'un rôle passif dans la genèse des plis tandis que le rôle moteur a été tenu essentiellement par les " terres noires". Il est certain que ces calcaires n'ont joué, en dehors des figures de détail, qu'un rôle passif dans les déformations auxquelles ont été soumises les formations de la fosse vocontienne. L'épaisseur de ces calcaires est beaucoup trop faible pour avoir pu intervenir activement dans la tectonique régionale et c'est au puissant ensemble plastique des "terres noires" et de l'Oxfordien, ainsi qu'à l'ensemble également déformable et épais du Crétacé inférieur, que la "fosse vocontienne" doit son style tectonique souple, si différent de celui du Vercors et de la chaîne Lure - Ventoux. Cette plasticité des " Terres noires " explique l'existence des grands anticlinaux  d'Aspremont et de Laragne dans lesquels viennent se fondre les plis des zones adjacentes. C'est à elle que l'on doit également l'allure éjective et parfois presque diapirique des anticlinaux pincés et laminés qui séparent les vastes synclinaux à fond plat.

 

            Aspres sur Buech est dans les Terres Noires, au-dessus à l’W la barre de calcaire tithonique est bien visible avec les couches d’oxfordien et de callovien au-dessous.

stratigraphie Diois Baronnies                                         M.Gidon

 

Au N de Serres, la barre tithonique est bien dégagée à l’W et elle forme une sorte de plateau, sous un pylône, un chevauchement de cette nappe sur elle-même est bien visible et le crochon montre bien que la poussée était du S vers le N.

Avant d’arriver à Serres, on franchit une barre calcaire de tithonique suivie par les marnes un peu ocres du berriasien, puis le valanginien et le hauterivien pour retrouver encore une barre tithonique juste avant la ville de Serres.

 

 Vallée de ROSANS

 

            Le nom de Serres vient de Sierra et signifie montagne, même origine pour Serres Chevalier, Alpe de Grand Serre…

            A Serres, nous prenons la route de Nyons (D994). Cette route est parallèle aux plis alors que la précédente suivait le Buech dans son cours perpendiculaire créant de nombreuses clues. Après le village de Montclus, arrêt pour examiner une faille dans un virage:  le mouvement est horizontal (coulissant) et la présence de fissures de Riedell (orientées à rebrousse poils du mouvement) permet de dire que cette faille est dextre.

 

 

            Au-dessus de cette faille, affleurement montrant de nombreuses alternances régulières de calcaire et de marne: cette régularité est très probablement due à l’origine climatique de ces alternances associées à la procession de l’orbite terrestre. Cette zone est très riche en empreintes d’ammonites.

 

 

 

            Nouvel arrêt quelques kilomètres plus loin au niveau d’un affleurement de calcaire hauterivien. Au milieu des alternances de couches calcaires habituelles, des zones sont désorganisées avec des formes arrondies. Nous sommes en présence de glissements syn-sédimentaires appelés slumps. Lors du dépôt des couches, sur des pentes très faiblement inclinées, des glissements gravitaires se sont produits. Ces couches se sont déposées dans une zone plus profonde que celles qui ont donné l’urgonien. En fait, nous sommes à la limite entre la zone urgonienne du Dauphiné  et la zone plus profonde correspondant au domaine vocontien. C’est sur les pentes de cette zone de transition que l’on voit ces slumps.

 

 

            Au delà du col de Saulce, nous prenons la direction de St André de Rosans pour faire le tour de la butte témoin de Risou : calcaire du crétacé sup. du turonien reposant sur des marnes aptiennes.

 

 

Sous le crétacé du turonien, présence de grés glauconieux avec de grosses boules très dures incorporées dans le gré moins induré. Ces boules correspondent à des zones de forte induration qui s’est propagée autour d’un germe, l’érosion les a ensuite dégagées des grés moins indurés plus tendres. Les boules de grés que l’on trouve en Corse sont elles dues à l’érosion du vent. La présence de ces glauconies prouve que le dépôt s’est fait dans un milieu confiné peu oxydant, ces grés, bien sûr détritiques, se sont déposés lors du bombement de la zone durancienne.

 

 

La MOTTE CHALANCON.

 

            En revenant un peu sur nos pas pour franchir le col des Tourettes, nous allons à l’affleurement bord de route de la Motte Chalancon. Ce bel affleurement est en passe de devenir la référence pour le stratotype du hauterivien. On note la régularité des couches avec un beau slump en plein milieu. Les empreintes d’ammonites sont nombreuses, certaines commencent à se dérouler.

 

 

 

24/04/07

Mont Ventoux.

 

            La route n’est pas ouverte jusqu’au sommet et il n’y a pas d’intérêt à monter à mi-hauteurr. Le Mont Ventoux est une dalle urgonienne qui chevauche le bassin vocontien. La dalle est inclinée vers le sud, elle fait partie d’une voûte anticlinale chevauchante. Le Ventoux au S et le Vercors au N sont moins plissés que les Baronnies, dans la compression, les dalles urgoniennes plus rigides ont limité le plissement qui s’est reporté sur le bassin vocontien.

            Au niveau de Malaucène, affleurements de molasses. La zone de Bédoin à la base S du Ventoux a été en émersion à l’éocène, il en a résulté de l’érosion et une accumulation de sable dans des zones plus basses. Le sable de Bédoin est connu pour sa très grande pureté en silice, il est utilisé pour la verrerie, la céramique et la fabrication des fibres optiques (du même type que les sables de Royans). Le climat lors de la phase d’émersion était chaud avec des alternances de périodes sèches ou humides ce qui est à l’origine de l’altération du fer. Il y a une grande diversité de teintes ce qui fait penser à Rustrel dans le Luberon bien que le processus soit totalement différent : ici le lessivage des sables a eu lieu lors de son transport. Ces sables très riches en silice sont pauvres en calcaire ce qui en fait l’intérêt, ils résultent de l’érosion du socle granitique du Massif Central puis ont été entraînés par les rivières jusqu’à Bédoin où ils se sont déposés dans un lac, à l’éocène la vallée du Rhône ne s’est pas encore effondrée et il y a continuité géographique avec la région du Ventoux. Les sables du Lubéron sont d’origine marine et non lacustre. La carrière de Crillon toute proche fournit le sable pour confectionner les bouteilles de Perier.

 

Carrière de Mazan.

 

            La carrière de Mazan est la plus grande carrière de gypse en France, le plâtre est fabriqué sur place. A l’oligocène, la phase de distension qui prolonge la compression pyrénéo provençale provoque l’effondrement de nombreuses cuvettes, l’effondrement de la vallée du Rhône est de cette période. De grands lacs se forment plus ou moins profonds, à Mazan, il y a 200 à 250m d’évaporites: du gypse qui est exploité à ciel ouvert. Ce gypse qui s’est déposé à l’oligocène est lacustre et non marin. Au  miocène, retour de la mer (paroxysme orogenèse alpine) ce qui entraîne les chevauchements et le dépôt des molasses.

            Pour mémoire: dans une mine on extrait du minerai et dans une carrière on extrait de la roche, que ce soit à ciel ouvert ou souterrain. Un minerai est une substance contenant du métal. Toujours pour soigner votre culture, si elle en a besoin, la route en hélice qui descend au fond d’une exploitation à ciel ouvert est appelée un pit.

 

 

DENTELLES DE MONTMIRAIL.

 

Les Dentelles sont trois écailles de calcaire tithonique. Lors du serrage alpin à l’oligocène, la faille des Cévennes (faille de Nîmes)  SW - NE qui est une faille hercynienne a rejoué en décrochement. Sous la pression, le gypse triasique est remonté dans la faille et a formé un diapir qui a débordé dans la cuvette de Suzette. Au passage, il a redressé le calcaire du tithonique en formant trois écailles : les Dentelles de Montmirail.

 

 

 

 

25/04/07

SUZETTE .

 

            La veille, nous avons accédé aux Dentelles depuis Gigondas, aujourd’hui nous avons fait le tour et nous les abordons par le S. Au niveau de Suzette, nous sommes dans une dépression avec des affleurements de cargneules et de gypse: il y a eu dissolution de celui-ci ce qui engendra la cuvette. Lors du déversement, le gypse du diapir a recouvert des marno calcaires type terres noires du jurassique.

 

 

ST MARTIN des EAUX.

 

            Affleurement de calcaire avec des couches très fines (parfois millimétriques) avec des couches de lignite et de calcaires bitumineux intercalés. Présence d’une couche fine de cendres volcaniques ocres. L’ensemble est lacustre, à l’oligocène et au miocène de grands lacs ont occupé des bassins d’effondrement et se sont comblés.

 

FORCALQUIER : les MOURRES.

 

Au N de la ville sur un plateau calcaire oligocène de 5 à 600 mètres d’épaisseur l’érosion a dégagé de grosses morilles calcaires.

 Ces structures se sont formées en bordure d’un lac à l’oligocène. La vase marécageuse s’est transformée en marnes. Des herbiers dans le lac ont capté le calcaire et les structures qui en ont résulté ont progressivement grossi. Ce calcaire plus résistant que les marnes apparaissent avec l’érosion. Le calcaire de ces Mourres est blanc et crayeux.

           

 

 

SYNTHESE sur les BARONNIES.

 

Les Baronnies sont bloquées entre le chevauchement urgonien du Vercors au N et celui du Ventoux au S.

 

PENITENTS DES MEES (l'usage local veut que l'on prononce le "s" final).

 

            Selon la légende, sept belles mauresques ont été fait prisonnières après une victoire sur les Sarrasins. Furieux de voir les moines se distraire de leur apostolat pour ces belles femmes, St Donnat, ermite de Lure, les aurait pétrifiés sous forme de ces rochers géants.

            Ils sont sur le versant W du plateau de Valensole. Les produits de l’érosion (du pontien au début du pliocène) se sont accumulés dans un bassin deltaïque le long de la faille de la Durance (plusieurs centaines de mètres d’épaisseur de poudingues pour 1500km²). Ce plateau a ensuite été entaillé par la Durance.

            Les pénitents se sont formés en limite du plateau sous l’action de l’érosion. Deux explications possibles à leur formation :

- des fissures ont fracturé l’extrémité du plateau et l’érosion le long de ces fissures a sculpté les pénitents,

- des indurations localisées correspondants à des remontées capillaires d’eau ont rendu plus solides certaines zones, lorsque l’érosion a agi, celles ci ont été dégagées en formant les pénitents.

 

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